Aujourd’hui nous retrouvons la fondatrice des Robin.e.s des Bennes, une association amiénosie à la communauté solidaire. Qui sont ces Robin.e.s ? Et que font-elles ? Pour en savoir plus, restez avec nous !
Bonjour Louise, comment vas-tu ? Est ce que tu pourrais te présenter et nous parler de ton parcours ?
Bonjour, bien sûr ! Moi c’est Louise et j’ai 28 ans. De formation, je suis éducatrice spécialisée et depuis 2018, après mon retour du Québec, j’ai un peu changé d’horizon. Maintenant, je travaille dans le développement durable à l’association En savoir plus. Je traite de tout ce qui concerne les déchets, le gaspillage alimentaire, et le fait de réparer plutôt que de jeter. Et à côté de ça, j’ai créé les Robin.e.s des Bennes à Amiens en 2018 parce que j’ai appris au Québec à “faire les poubelles”. C’est ce qu’on appelle le dumpster diving et c’est donc ceci que j’ai voulu remettre en place à Amiens. Du moins, je voulais voir si c’était possible et c’est de là que sont nées les Robines des Bennes. Cette association amiénoise a vraiment été fondée selon la loi 1901 en mars 2019 et depuis elle ne fait que progresser. Voici un petit résumé de mon portrait, rien de foufou !
Au contraire, tu as un parcours très intéressant ! Mais dis nous en plus : qui sont les Robin.e.s des bennes ? Peux-tu nous présenter l’association ?
L’idée derrière Les Robin.e.s des Bennes est de lutter contre les gaspillages et la précarité. Nous avons tout un volet qui concerne les produits alimentaires. Nous allons faire les bennes des supermarchés pour sensibiliser au gaspillage, mais nous avons aussi des partenaires qui nous donnent leurs invendus, des produits que nous redistribuons gratuitement.
Ensuite, nous allons aussi glaner dans les champs, avec des producteurs pour faire des disco soupes ou disco smoothie. Et puis depuis janvier 2021, nous avons mis en place le frigo partagé à Saint-Leu, qui s’appelle Extra Tes Restes. Ca c’est le côté alimentaire, mais on parle des gaspillages car il y a aussi le côté vestimentaire, les dons d’objet, l’électroménager, les plantes… et puis sans oublier le concept de Freeperie, qui est arrivé en milieu d’année 2019. Le mot d’ordre des Robin.e.s des Bennes, c’est vraiment la gratuité ! Rien n’est vendu, rien n’est loué, il n’y a aucune notion d’argent. L’idée c’est de construire un réseau d’économie sociale et solidaire, quelque chose de vraiment détachée du système capitaliste dans lequel on est.
Est-ce qu’on peut dire que le principe du Zéro Déchet est le cœur de votre association ?
Oui totalement ! Cela rejoint toute notre démarche puisque pouvoir donner des choses qui ne nous servent plus permet un maximum de limiter les déchets. Mais ça va plus loin car nous sommes aussi dans une démarche d’arrêter d’acheter du neuf. En soit, limiter les déchets c’est chouette, mais il faut que cela puisse se coupler avec de la sensibilisation et avec le fait que les gens n’ont pas toujours besoin d’acheter du neuf. Alors, on retrouve l’ambition du Zéro Déchet chez les Robin.e.s avec le frigo partagé, les Freeperies et ce groupe privé sur Amiens avec 4300 personnes qui nous permet de partager des choses. Et pour te donner un exemple, là le truc marrant sur le groupe dernièrement, c’est que quelqu’un a acheté une banderole “joyeux anniversaire”, avec des sortes de ballons gonflés à l’hélium. Cette personne l’a mis en don ensuite. Et là nous sommes au cinquième anniversaire avec la même banderole !
Ah mais c’est extraordinaire ça !
Oui, et je me dis c’est fou ! Parce que déjà, les gens font des économies, les gens se rencontrent. Quand tu vas chercher cette banderole, tu rencontres quelqu’un que tu ne connaissais pas avant, qui va te donner quelque chose. Et toi, tu fais ton anniversaire, avec quelque chose qui t’a couté 0 euro, et que tu ne vas pas jeter parce que tu le redonnes derrière. Franchement, la démarche est vraiment sur la rencontre et le partage. D’ailleurs, il faudrait que je fasse plus souvent des appels à témoignage, parce que les gens ont vraiment découvert un truc qui leur plaît vraiment.
Je pense que tu as tout à fait raison ! C’est le genre de petite histoire très inspirante mais qui sensibilise sur toutes ces notions de dons, d’entraides, de partage, de solidarité et de rencontre ! Nous, par exemple, nous nous sommes rencontrés à cette fameuse Freeperie. Et vu le nombre de personnes qui se sont déplacées, pour un dimanche, et l’engouement, c’est vraiment top.
Oui, on a eu 700 personnes sur les deux jours ! J’avoue que pour Dreuil-les-Amiens, il fallait que les gens se déplacent un peu, il n’y avait pas trop de bus, surtout un dimanche, et pourtant on a tablé sur 350 personnes en une seule après-midi. C’est énorme !
Honnêtement, c’est top ! Félicitations ! Je t’avoue qu’avant je ne connaissais pas ce type de friperie : Freeperie. Est-ce que tu peux nous parler un peu plus de cette action ? D’où vous est venue cette idée ?
Moi non plus, je n’avais jamais entendu parler d’une friperie 100 % gratuite. Je savais qu’il y avait une explosion des friperies vintages dans les villes et que ça attirait notamment un public jeune qu’on ne voyait pas avant dans tout ce qui est Ding Fring, ou autre car il en existe beaucoup, des vestiaires solidaires.
Mais ce concept est arrivé car sur le groupe, quand les gens donnent des objets, ça part vite. Les gens visualisent tout de suite à quoi ça sert, quelle taille ça fait… Sauf que des gens ont commencé à donner des vêtements. Et en vrai, quand on te montre une photo avec un sac et on te dit, j’ai ce sac à donner, on ne sait pas trop si ça va nous aller, et c’est un peu galère à redistribuer. De ce fait, on s’est dit pourquoi ne pas proposer aux gens de capter le flux de vêtements qu’ils ont à donner et ensuite les distribuer lors des évènements qui vont être sur la convivialité ? Un événement sur deux journées où tout sera gratuit. Et de là est né le concept de Freeperie.
En fait, toute la dimension sociale de cette Freeperie vient aussi des dons de la communauté pour la communauté.
Oui ça vient de là. Il faut savoir que Freeperie c’est un mot qu’on a protégé, qu’on a déposé en tant que concept. C’est vrai qu’au tout début, on a pataugé un petit peu parce qu’on voulait faire juste des petits évènements. On s’est vite rendu compte qu’en termes de stockage, c’était compliqué parce que c’est des tonnes et des tonnes de vêtements qu’il faut trier, déplacer, et bien présenter sinon les gens ne fouillent pas… C’est vrai, on a un peu tatonné au début, et puis aujourd’hui – du moins, la Freeperie où nous nous sommes rencontrés – c’est vraiment l’apogée (cf. édition Juin 2021). On a trouvé notre rythme, parce qu’à chaque fois, il faut 25 à 30 bénévoles, ce n’est pas rien.
Vous avez organisé combien de freeperies en tout ?
Environ sept, mais des plus petites Freeperies. En fait, notre projet pour rester dans la dimension solidaire, est de rendre notre Freeperie itinérante. On aimerait vraiment aller dans chaque quartier d’Amiens. Déjà, on a pu faire le quartier Saint-Leu, Pierre Rollin, Dreuil-lès-Amiens et la prochaine aura lieu sur le quartier Etouvie. On essaie donc de se rapprocher de personnes qui n’ont pas forcément les moyens de se déplacer. Dans l’idéal, pour faire rayonner ce concept et partager encore plus, on aimerait pouvoir se dire dans un an ou deux que dans chaque quartier d’Amiens métropole, il y a une Freeperie par an !
C’est un très beau projet, et on vous souhaite beaucoup de succès dans cette démarche solidaire ! Est ce qu’il y a déjà une future Freeperie prévue dans l’année ?
Oui, il y en aura une fin août. A court terme, l’objectif est qu’il y ait une Freeperie tous les trois mois. Ça permet de faire un petit turn-over des vêtements par rapport aux saisons. Après, si un jour on a vraiment les moyens, ce serait d’organiser une Freeperie par mois voire un jour une boutique éphémère… Ce serait magnifique !
Tu m’as parlé de limiter l’achat de produits neufs, que penses-tu de la mode actuelle ? Plus précisément la fast-fashion…
Tout va très vite ! Il faut se tenir au goût du jour et tout coûte très cher. Après, je ne suis pas une grande fan de la mode à la base. Je ne suis pas accro aux dernières nouveautés. J’aime bien avoir mon style et particulièrement les baskets. Et puis d’ailleurs les baskets sont très difficiles à avoir en friperie parce que les gens les ont mises jusqu’au bout souvent car ça coûte cher. Personnellement, ce qui me sidère le plus, c’est toute l’exploitation animale qu’il y a derrière cette mode et sur le fait qu’on consomme et on consomme, pour finalement mettre 30% de notre garde-robe. Sachant que tout cela a demandé beaucoup d’énergie, beaucoup de matières premières, on va droit dans le mur en continuant comme ça. Là on le voit avec la Freeperie, tout ce qu’on a en vêtement bébé ! Globalement on a beaucoup de vêtements mais en vêtements pour bébés, c’est impressionnant ! Il y en a assez pour que plus personne n’achète rien ! Sur les Freeperies, on aimerait vraiment lancer un peu de sensibilisation sur cette mode, avec peut-être une exposition avec des chiffres clés.
Et du coup, comment imagines-tu la mode de demain ?
Je pense dans un premier temps, avec la Covid-19, et la précarité qui est montée en flèche, beaucoup de personnes ne vont pas avoir le choix pour se vêtir que de s’habiller moins cher. Mais pour moi, la mode va évoluer avec les personnes qui sont plutôt privilégiées, qui ont les moyens de s’habiller autrement. C’est là que va se faire le déclic. Si les grandes marques commencent à suivre, c’est parce qu’il y a des lois, mais aussi parce que certains consommateurs qui ont les moyens deviennent de plus en plus sensibles au développement durable.
Il y a de plus en plus une prise de conscience.
Oui, Il y a une prise de conscience mais c’est aussi l’image verte qui motive certains. Après il n’y a pas vraiment trop de cohérence. Si tu as acheté les supers nouvelles baskets vegan et que tu manges un steak frites tous les jours, pour moi il n’y a pas de sens. La démarche est plus globale que ça. Mais c’est un petit pas positif, donc prenons les quand ils viennent et on verra par la suite.
Pour revenir sur les Robin.e.s des Bennes, comment peut-on faire des dons de vêtements. Comment soutenir votre association dans cette belle action durable ?
Pour soutenir l’association, tu peux prendre ton adhésion en ligne et/ou faire un don. Ça nous aide beaucoup. L’adhésion est de 2 euros par an, ce n’est pas énorme mais c’est déjà très bien et ça montre que les gens se mobilisent. Ensuite pour les dons de vêtements, nous avons un local qui nous est mis à disposition gratuitement par deux Robin.e.s qui habitent sur place, et nous avons des permanences. Les informations sont indiquées sur notre page Facebook et sur Instagram. Et en septembre nous aurons un site internet aussi.
C’est parfait ! Merci beaucoup pour le temps que tu nous as accordé mais surtout
merci aux Robin.e.s pour vos actions solidaires et durables !